Suricate
Suricata suricatta
Surnommé « sentinelle du désert », ce petit mammifère insectivore grégaire, diurne, appartient à la famille des mangoustes, plus exactement la famille des herpestidés comprenant 14 genres et 34 espèces. Le suricate forme un genre original au sein de cette famille.
Sa silhouette dressée sur les pattes arrière l’a rendu très populaire.
Il vit en Afrique Australe, dans les déserts et les savanes sèches de ces régions. De toutes les mangoustes, c’est celle qui occupe les zones les plus arides. On la trouve rarement près des côtes mais plutôt à l’intérieur des terres et sur les hauts plateaux. Elle a besoin de sols fermes pour creuser ses terriers qui lui assurent une protection contre les prédateurs et les températures extrêmes du désert. Elle peut creuser jusqu’à 2 m de profondeur ! L’hiver, elle compense la fraîcheur des nuits en se chauffant plus longtemps au soleil la journée (12 heures au lieu de 8 h en été).
Les conditions de vie difficiles de son habitat sont à l’origine de sa structure sociale très développée. Il existe une véritable solidarité et une affection surprenante entre les membres d’une même communauté pour se défendre contre les prédateurs, pour défendre son territoire et exploiter sa nourriture.
Le suricate côtoie l’oryx gemsbok, herbivore typique de ces régions. Cet environnement abrite également une petite faune variée de coléoptères, papillons, chenilles, mouches, termites, criquets, araignées et scorpions, qui forment la base de son régime alimentaire. Il a une vision excellente qui lui permet d’apercevoir de loin les prédateurs. Par contre, cette vision n’étant pas efficace dans la pénombre, le suricate se couche « comme les poules » : avant le soleil et se lève après lui. Il a un odorat très développé pour rechercher sa nourriture. Les vibrisses qui couvrent sa tête l’aide également à cette tache.
Prospectant chaque jour un secteur différent, les suricates passent la majeure partie de leur journée à la recherche de larve dodue, flairant et grattant la terre, inspectant chaque recoin afin de mieux exploiter leurs ressources. Ils raffolent des insectes mais ne dédaignent pas les scorpions, lézards et petits rongeurs.
D’ailleurs, lorsqu’un individu saisit un scorpion, il le frappe vigoureusement avec ses pattes antérieures pour l’assommer et se protéger des pinces et de la queue. Puis il le tient entre ses griffes et lui arrache le dard avant de le manger.
Malgré leur comportement altruiste au sein de leur colonie, les suricates ne partagent pas leur nourriture, chacun subvenant à ses propres besoins (la petite taille des proies est la cause de cet individualisme inattendu). Ils peuvent rester plusieurs mois sans eau qui leur est fournie en quantité suffisante par les insectes et larves qu’ils mangent et également par les racines et tubercules gorgés d’eau qu’ils déterrent.
Lorsqu’il mange, le suricate surveille les autres, pour ne pas se retrouver isolé. L’important est de rester groupé pour être en sécurité. Pendant que les membres du groupe fouillent le sol, l’un d’eux, posté en sentinelle sur une souche ou une termitière, scrute les environs et change de perchoir à mesure que le groupe se déplace.
Des recherches récentes montrent que les guetteurs sont des individus rassasiés. Chaque surveillance dure environ une heure pendant laquelle la sentinelle émet des cris continus à intervalles réguliers lorsque tout va bien. Les guetteurs poussent des cris afin que chacun puisse se situer par rapport au groupe. Ils attendent les réponses de chaque membre. Si un suricate ne répond pas, une sentinelle part à sa recherche.
En cas de danger, il aboie ou siffle très fort. Le groupe se précipite alors chacun dans son terrier. La progéniture ne fouille pas le sol avant l’âge d’un mois, elle suit un suricate plus âgé qui joue le rôle d’éducateur. S’il y a danger, les petits retrouvent leur mère ou sont protégés par des adultes.
La vue d’un chacal provoque une vive réaction : les suricates se rassemblent, dos arrondi et queue dressée, grimpent sur une termitière par exemple, fixent le prédateur et aboient dans sa direction. Le chacal, impressionné par la douzaine de gueules qui lui font face, se retire. Son départ est suivi de manifestations chaleureuses : les suricates se caressent et se reniflent tous, comme pour se féliciter de leur succès commun.
Quand ils rencontrent un gros serpent comme le cobra, les suricates sont plus offensifs. Se mettant à plusieurs, ils poursuivent le reptile et le harcèlent, l’obligeant à faire front. Très vite, le cobra se fatigue ; un mâle finit par le saisir à la nuque et le tuer.
À l’inverse, face à un rapace, la meilleure défense reste la fuite jusqu’au terrier le plus proche. L’enlèvement d’un des leurs est la cause d’un émoi considérable, car jamais un membre du groupe n’est abandonné tant qu’il reste une chance de le sauver.
Comme la plupart des mammifères, les suricates délimitent un territoire (de 6 à 15 km2 pour un groupe de 30 individus) au moyen d’odeurs déposées par endroit. Mâles et femelles possèdent des glandes anales qu’ils frottent sur des supports choisis afin d’y étaler leur musc. Ce comportement est surtout caractéristique des mâles. Leur odeur est également propagée par l’urine et par les latrines communes. C’est un réflexe très fort, qui apparaît tôt dans la vie du suricate : les jeunes déposent leurs excréments aux mêmes endroits que les adultes. Chaque suricate, frottant son corps sur les marques laissées par les membres du groupe, en plus de se caresser les uns les autres renforce la cohésion sociale. Ils ont la même odeur. Celle-ci constitue un signe d’identification : tout individu porteur d’une odeur étrangère sera chassé jusqu’à la limite du territoire du groupe.
Les suricates partagent volontiers leur terrier avec la mangouste jaune et l’écureuil terrestre, espèces avec lesquelles ils n’entrent pas en compétition pour la nourriture.
Dans le clan, seul le couple dominant se reproduit, à l’instar des meutes de loups. Les subordonnés aident à l’élevage des jeunes, à la construction du nid et à sa défense. Cependant, la communauté des suricates est régie sur la base de la répartition des tâches. Il n’y a pas de hiérarchie imposée. Chaque individu se voit attribuer une fonction précise : sentinelle, baby-sitter, chasseur… cette attribution s’effectue à tour de rôle. Tous vivent dans le même terrier.
La saison des amours correspond à la saison chaude. La gestation de la femelle dure onze semaines, à l’issue desquelles elle donne naissance aux petits dans une des chambres d’un terrier. Celui-ci sera occupé par le groupe pendant toute la durée de l’élevage. Une portée est en moyenne de trois petits qui ne sortiront du terrier qu’au bout de plusieurs semaines. La femelle ne change rien à ses habitudes et passe ses journées dehors, à la recherche de nourriture, pendant que les jeunes restent sous la garde d’adultes des deux sexes. Ainsi, la mère, parcourant le territoire en compagnie des autres adultes, pourra se nourrir correctement et allaiter ses petits. De cette façon, le groupe augmente les chances de survie de ses jeunes.
Le sevrage commence à l’âge de trois semaines et devient définitif entre six et neuf. Ce sont les adultes de garde qui, les premiers, apportent des proies aux jeunes : la mère ne leur apprendra à se nourrir que lorsqu’ils seront capables de la suivre dans la chasse.
Durant cette période d’apprentissage, tout adulte abandonne sa proie à un petit qui la lui demande. Ce réflexe disparaît à fur et à mesure que les jeunes grandissent et apprennent à chasser seuls. Pour les inciter à chasser, la mère court devant eux, une proie dans la gueule. Habitués à être ravitaillés, ils se précipitent sur elle pour s’emparer de cette nourriture. Peu à peu, ils se mettront eux-mêmes à chasser. Lorsque les températures sont très chaudes, parents ou leur substitut recouvrent les petits de sable pour les mettre à l’abri du soleil au cours des déplacements.
Leur longévité est d’environ 10 ans.
Il existe trois sous-espèces :
Suricata suricatta suricatta occupe la majeure partie de l’aire de répartition ;
Suricata suricatta marjoriae vit dans le désert de Namibie ;
Suricata suricatta iona habite le pré désert de Namibie, à l’extrême sud de l’Angola.
Le suricate n’est pas un animal nuisible pas plus que l’homme ne menace encore sérieusement son milieu de vie. Il peut être élevé comme animal domestique en Afrique Australe ou il vit à proximité des habitations. Ce n’est que récemment que cette espèce a éveillé la curiosité des chercheurs par sa structure sociale très développée. L’entraide des suricates d’un même groupe et l’altruisme surprenant que manifeste cette petite mangouste expliquent l’intérêt chez les éthologistes, d’autant que l’animal, peu farouche est aisé à étudier dans son milieu naturel. Les suricates ne sont pas menacés de disparition, grâce à l’existence en Afrique du Sud de plusieurs aires protégées où ils vivent et se reproduisent en sécurité.